A l'heure du Mytho-Ryu, j'ai retrouvé cette petite perle dans mes grimoires…
notre envoyé spécial en Corrèze, Benoît DEKAJOUX, et en exclusivité pour nos lecteurs. Dans la série "Oui, le Budo est encore vivant !", une naissance vient d'avoir lieu, non seulement en Europe, non seulement en France – Cocorico ! – mais en Corrèze. B. DEKAJOUX a découvert le Père de ce nouvel Art Martial. J'ai nommé O Senseï Jean-Robert TROUILLARD, créateur du FOKUDO.
Après avoir quelques peu cherché, j'ai pu trouver l'habitation de O Senseï Jean-Robert TROUILLARD, cachée derrière le cimetière d'un petit village dont je tairais le nom pour satisfaire à l'extrême modestie du Maître. Son humilité exemplaire le pousse même à ne répondre qu'au dix-huitième coup de sonnette, et à n'ouvrir sa porte – sur laquelle aucun nom n'est porté – qu'après avoir vérifié ma carte professionnelle de journaliste. Trop d'admirateurs sans doute… Intérieur frustre, sobre et sans clinquant. Je suis reçu dans le hall d'entrée, et nous y resterons durant l'interview.
Benoît DEKAJOUX – Bonjour euh… Dois-je vous appeler "Maître" ou "O Senseï" ?
O Senseï Jean-Robert TROUILLARD – Bonjour à vous. Bien que je n'apprécie pas vraiment, je préfère… Obligatoirement O Senseï. L'ensemble de mes élèves, ainsi que mes disciples font ainsi, alors…
BD. – Le monde du Budo vient de recevoir avec stupéfaction la nouvelle de votre création. Quel est son nom exact ?
OSJRT. – J'ai décidé de le nommer le "FOKUDO". Comme chacun sait DO signifie "La Voie".
BD. – Et FOKU ?
OSJRT. – Hé bien au départ, je voulais le baptiser le "TROUILLARD-DO", … De mon nom de baptême TROUILLARD. Mais le "D" final faisait répétition avec celui de DO. Et puis cela pouvait paraître immodeste, ce qui n'est pas le cas. Alors j'ai cherché. Vous savez comment est la vie des enfants dans les petits villages, chacun fini par avoir son surnom, par fois sans aucune raison, ni aucun sens. Le mien a toujours été "Foku". On se demande où les enfants vont chercher de tels mots. Bref, cette appellation m'a suivi de la communale à aujourd'hui, au travail et au café. D'où FOKUDO !
BD. – Mais où sont vos racines, vos origines ?
OSJRT. – Oh, j'ai eu un parcours banal. Je suis né en 1943 à Vichy où mes parents étaient fonctionnaires. Ensuite – après la guerre – nous avons dû déménager assez souvent car mon père recherchait une grande tranquillité. Nous l'avons trouvé dans ce village où j'ai fini de grandir.
BD. – Et votre parcours Martial ?
OSJRT. – C'est au collège qu'est née ma passion pour les Arts & Disciplines Martiales. Là j'ai pratiqué le judo durant de longues semaines. Dans la cour aussi, je m'exerçais au Karaté… Disons que j'exerçais les autres. Je suis vite devenu un partenaire privilégié. En fait : tous s'exerçaient sur moi à longueur de récréation ! Mais au fond je sentais bien qu'il me manquait quelque chose… Une anecdote m'a fait prendre une décision : Lors d'un combat amical, sans arbitre d'ailleurs, sous une table du réfectoire, je me suis aperçu avec tristesse, combien de mes nombreux adversaires usaient de leur force à tort et à travers sur moi. Je riais (Intérieurement pour ne pas vexer) du gaspillage d'énergie dont ils faisaient preuve : Qui un coup de poing, qui un coup de pied, alors que j'étais au sol dès le début de l'agression. Le pire est que même après que je sois inconscient, ils ont continué : Inutile gaspillage en vérité.
BD. – C'est à ce moment-là que vous est venue l'idée du FOKUDO ?
OSJRT. – Pas encore. Disons que ce fut la graine… Après cet événement, j'ai décidé de faire une retraite. Cinq semaines à l'hôpital, puis chez mes parents, ici, en convalescence. J'ai effectué des recherches : Livres de Karaté, film de kung-fu, retransmission de match de boxe et de compétitions de judo.
BD. – Le FOKUDO est donc une "Synthèse" ?
OSJRT. – Oui. Mais cela est resté latent en moi environ dix-sept ans, quatre mois et neuf jour. Jusque l'an passé, au mariage d'un ami d'ami… Ce jour-là, l'arrière grand père de la mariée, une force de la nature de quatre-vingt-treize ans, un peu éméché, mais bien plus lourd que moi, voulu me provoquer. Cela faisait six heures que je m'étais enfermé dans les WC, lorsque ce lâche a abandonné le combat, et bloqué la porte avec une chaise. J'ai décidé de sortir par le vasistas. A l'atterrissage, ma tête a touché le sol, et c'est là que j'ai eu mon "SATORI". Une immense illumination : Voyez d'ailleurs la cicatrice.
BD. – En effet. Mais venons en aux faits : Qu'est-ce que le FOKUDO ?
OSJRT. – Je ne sais par où commencer, c'est si vaste !
BD. – Parlons des principes de base ? Comment l'enseignez-vous ? A qui ?
OSJRT. – J'ai d'abord voulu créer un Art contemporain, adapté aux contraintes, aux nécessités et aux moyens de la vie moderne. Deux maximes sont affichées au dojo. La première au dessus de la porte de la salle d'exercice :
<< On ne peut bien combattre que lorsqu'on est sûr de gagner. >>
La seconde est une forme de postulat Martial, qui restera, je pense, après ma mort :
<< Dans le doute……… Hésites ! >>
Les deux sont parfaitement complémentaires, et contiennent l'essence même de mon Art. J'y ajoute trois préceptes basiques, supports de toute ma pédagogie :
1°) Ne jamais s'attaquer à plus fort que soi.
2°) Ne jamais s'attaquer à plus nombreux que soi.
3°) Ne jamais s'attaquer à mieux armé que soi.
BD. – C'est vraiment limpide. Comment se déroule l'étude au dojo.
OSJRT. – A partir de ces trois diktats plusieurs chapitres sont développés :
a)- Le Combat proprement dit, que nous étudions au dojo.
b)- Les déplacements
c)- Le travail avec armes
d)- Le spirituel, avec une certaine forme de calligraphie, sur des supports divers
BD. – Combien êtes-vous à pratiquer dans votre dojo ?
OSJRT. – Aujourd'hui, l'effectif, dans sa totalité, se monte, globalement, hormis mon épouse qui pratique en dilettante, à six. En gros : Ma soeur et mon beau-frère – Josette et René -, les deux cantonniers – Joseph et le Claudius – qui sont sous mes ordres à la Mairie, ainsi que deux dynamiques pensionnaires de l'hospice. Mon épouse est très occupée par la partie comptable et financière du club.
BD. – Comment évoluent vos élèves : Il y a des grades, des niveaux ?
OSJRT. – Oui, avec des tarifs selon la hauteur de leurs moyens. En fait vous verrez que la rigueur est le maître-mot de notre organisation : Pas de chèque, pas de grade. Tout est codifié. Le débutant commence par l'étude des cas simulés les plus faciles. Le premier niveau est le kata d'attaque "VEG-NA-EV". En clair : Vieil Ennemi Grabataire, Non Armé, Endormi sur le Ventre. Puis avec la progression et les mensualités correspondantes, les situations se compliquent: VEG-NA-ED, Endormi sur le Dos. EG-NA-ED: Ennemi n'est plus aussi vieux. E-NA-ED : Pas vieux, pas grabataire… Je vous ferais grâce de la liste de mes créations, sinon qu'elle se termine par l'ultime kata d'attaque (dont je ne vous souhaite pas d'avoir besoin) : EJBS-EQPE:DF, Ennemi Jeune, en Bonne Santé, Et Qui Plus Est : De Face ! (Là c'est l'extrême.). On passe aussi du temps au travail des armes : Saboter le percuteur de l'arme à feu d'un futur ennemi, émousser la pointe ou le tranchant de son couteau, jusqu'à la provocation du suicide qui est le "TOP". Sachant qu'il existe un niveau intermédiaire (Fokuchidoin) à "Se servir sur autrui, de l'arme d'un autre autrui…"( Travail avec gants, masque et maquillage). Enfin, comme je vous l'ai dis, une grande part est accordée à l'étude des déplacements, principalement "Fuir", ou "Trouver une cachette" ou "Se noyer dans la foule".
On passe aussi à des situations plus concrètes : Fuir avec les vêtements de son voisin, etc. Jusqu'à la Maîtrise (O-Foku – que pour l'instant je suis seul à posséder) : "Fuir sans en avoir l'air".
BD. – Vous m'avez parlé de Calligraphie, de quoi s'agit-il ?
OSJRT. – Les étudiants abordent ce domaine après avoir atteint un niveau déjà assez pointu, stade où, par ailleurs, les chèques de cotisation sont remis signé "en blanc" à ma femme, pour ne pas troubler la sérénité du lieu par une vénalité inopportune. Ces calligraphies sont de deux ordres :
– Les fausses nouvelles, qui relèvent plus de la rumeur que du mensonge pur. Le support est généralement mural, en extérieur (Rues passantes, feux, places), avec des dimensions de caractères proportionnelles aux résultats désirés. Selon l'état du support on use de bombes de peintures (Murs crépis) ou de feutres indélébiles (Pas au début, cela tache). Par cette étude on développe la créativité de l'élève : Sur quelle maison peindre ? Quelle auto barbouiller, quel bus, quel portail, etc. ?
– Les vraies nouvelles, généralement sur lettres anonymes. L'étude demande toute la spiritualité contenue dans la délation. Là certains sont plus doués, mais tous finissent par y arriver. L'adepte atteint le niveau de maîtrise lorsqu'il peut citer par coeur les adresses des Trésors Publics, des gendarmeries, ou des commissariats de sa région. Travail mémoriel essentiel et profond.
BD. – Avec tout cet enseignement, continuez-vous vos recherches ?
OSJRT. – Bien sûr ! Une "Nomenclature d'attaques d'enfants" vient de paraître, en trois fascicules : 4 à 7 ans, 8 à 10 ans et 11 à 14 ans. Je viens de commencer, voici 6 mois la même démarche, mais auprès des personnes âgées.
BD.– Quand pensez-vous l'éditer ?
OSJRT. – Alors là j'aurais du mal à vous le dire. Bon nombre de mes adversaires d'étude décèdent lâchement avant les fins de combat. Il va me falloir les choisir avant qu'ils n'atteignent 85 ans… Ce qui fausse les données de départ : A cet âge, certains peuvent encore courir ! Mais j'ai bon espoir.
BD. – En vous remerciant pour votre accueil, et la remise de 30 % sur vos tarifs d'interview, auriez-vous un dernier mot pour nos lecteurs ?
OSJRT. – Venez nous rejoindre, c'est ouvert à tous : Pas besoin d'aptitudes. Ni souplesse, ni force, ni même courage.
Et n'oubliez pas : << Dans le doute… Hésites !>>
Ps : Les photos sont juste là pour décorer, elles n'ont rien à voir avec le texte