05/01/2019

Pratiquer le sabre mais encore

En effectuant quelques rangements, je suis retombé sur ces textes écrits il y a déjà longtemps mais qui restent d’actualité dans notre pratique de tous les jours.
Du moins dans les écoles telle la nôtre pour laquelle la pratique du sabre est l’élément fondateur des gestes.
Les concepts suivants sont difficiles à traduire. Ils sont développés au cours des entraînements et ne peuvent être convenablement compris que de cette manière, seule une brève explication est ici tentée.


DAI KYO SOKU KEI : Grand, fort, rapide,régulier :
– Ce sont les quatre caractéristiques générales les plus importantes dans la technique du sabre long : Exprimées dans l’ordre, elles seront mises en relief auprès des débutants. Tout d’abord, l’accent est mis sur de grandes actions, ensuite lorsqu’elles sont grandes, elles peuvent devenir fortes. Une fois que la sensation de force interne s’est développée, la vitesse peut-être graduellement augmentée sans précipitation et sans hâte. Puis, une fois que les techniques sont grandes, fortes et rapides, elles peuvent être rassemblées dans une méthode continue et régulière.
ENZA NO METSUKE :
– Contemplation des montagnes lointaines. Cela veut dire diriger le regard à une certaine distance, sans fixer aveuglement, mais plutôt en regardant toutes les choses également. Il n’est pas nécessaire de regarder chaque petit détail de l’ennemi, aux dépens de l’ignorance d’autres menaces. Il est seulement nécessaire de percevoir sa distance et sa vitesse d’exécution. L’ennemi devant nous sera au centre de notre champ de vision, mais ne sera pas le point visuel convergent. Ce qui explique les paroles de Musashi:  » la perception est forte et la vue est faible. ». C’est une partie de Fudoshin. Dans un livre très détaillé, on y indiquait qu’il fallait regarder « les deux étoiles » à comprendre les mains et plus précisément la jointure entre le pouce et l’index puis « la montagne et la vallée », l’intérieur des deux coudes pour arriver aux « monts lointains », le sommet des épaules comme si nous scrutions l’horizon.
Bien évidemment cela se faisait et se fait assez rapidement. Cependant il est intéressant de le travailler lentement de façon à bien percevoir la sensation.
FUDOSHIN :
– Ce terme peut-être traduit diversement comme, esprit sans entrave, esprit non arrêté. Il a été mieux décrit par des maîtres éclairés tel que Yagyu Munenori et des maîtres Zen tel que Takuan Soho. Il se réfère aussi avec Shi Shin. Cet état a un rapport quand l’esprit est libre de percevoir toutes choses, quand il n’est pas entravé en étant retenu par des pensées conscientes (Fushin).

FUKAKU :
– C’est une particularité du caractère/de l’attitude du budoka expérimenté. Elle se développe au cours des années d’entraînements rigoureux. Elle est impossible à décrire, mais avec l’expérience, elle devient reconnaissable chez les autres.
FUSHIN :
– L’esprit arrêté. Quand il est entravé par la peur, le doute ou, distrait par des réflexions logiques et conceptuelles (intellectualisation), l’esprit n’est pas libre de répondre aux circonstances.
JO HA KYU :
– Ce terme dérive de la forme dramatique du théâtre Nô. Il décrit les actions en totalité et sur une échelle de minutes. Il se traduit comme la préparation, le développement, et la conclusion.
Sa signification est dans le temps d’exécution, une accélération graduelle avec une sensation de pression croissante jusqu’à son maximum quand le mouvement s’arrête. Le déplacement des pieds (Ashi Sabaki) du Nô et du Kendo sont très semblables, comme le sont, à cet égard, les formes dramatiques des pièces de Nô et les Kata de Iaido.
KASSO TEKI :
– Approximativement traduit, cela désigne un adversaire imaginaire. En effet, cela ne se réfère pas seulement à la distance et à la position, mais quels effets produira votre action ; Par ex : après une coupe infaillible, est-ce que l’ennemi va tomber en arrière, s’écrouler sur place, basculer sur un des côtés.
En d’autres termes, toute la logique de votre action est en relation avec la taille, la position et le mouvement de vos adversaires.

KIGURAI :
– Le maintien, le comportement. La supériorité qui vient avec la connaissance de l’utilisation du sabre. Mais ce n’est pas de l’arrogance. C’est la caractéristique qui ferait obstacle, en dernier lieu, à tout agresseur potentiel et audacieux, de porter une attaque.
KI KEN TAI ICHI ( SHIN GI TAI ICHI) :
– L’esprit, le sabre et le corps ne font qu’un. C’est la coordination de toute la personne du sabreur dans un engagement total. En premier, c’est la chorégraphie de poser le pied en même temps que la coupe et le souffle. Le sabre précède le corps. Plus tard ils deviennent inséparables, une seule entité.
KIRYOKU :
– Forte détermination : Quand l’attaque est caractérisée par un Ki ken tai Ichi, un Jo Ha Kyu et un Seme et, si le sabreur démontre un Kigurai et un Fudoshin ; il y aura une telle impression de ne pas pouvoir arrêter cette attaque, que l’ennemi ne pourra pas résister. C’est Kiryoku.
KOI GUCHI NO KIRI GATA :
– Manière de couper la « bouche de carpe ». C’est la technique de déblocage de la Saya ; ce qui veut dire, la vitesse des mains arrivant à la Tsuba et à la Tsuka, la position et la manière de pousser en avant la Tsuba, la vitesse de la prise de la main gauche et de la droite quand on commence à dégainer.
KOKORO :
– Il n’y a pas un mot unique en Français pour ce terme. Il est souvent traduit comme l’esprit, le coeur, et même l’honneur. C’est l’attitude de franchise et d’honnêteté qui inculque la confiance et le respect.
RIAI :
– Signification ou logique. Ce qui veut dire, la compréhension de ce que vous vous destinez à faire. En grande partie, c’est Kasso Tekki, mais cela n’inclut pas seulement l’ennemi à trancher, mais les obstacles à éviter, la position des autres personnes proches qui ne sont pas impliquées, et tous les autres points spécifiques qui sont fixés par la forme.

SATSU JIN KEN / KATSU JIN KEN :
– Quand le sabre est employé sans réflexion, ou sans discipline, sans discernement : Cela est destructeur; En conséquence, nous appelons cela le sabre de prise de vie – Satsu Jin Ken. Quand d’autre  part, le caractère développé du sabreur expérimenté le rend capable de traiter pacifiquement les conflits, et sans utiliser sa capacité de résoudre les choses en utilisant la violence, nous appelons cela le sabre du don de la vie – Katsu Jin Ken.
ISAYA NO UCHI NO KACHI :
– La victoire dans la Saya. C’est l’ultime objectif du sabreur, obtenir la victoire tandis que le sabre n’est pas dégainé.
SEI TO DO :
– Sang-froid et mouvement. Quelque soit l’activité du corps, la pensée et l’esprit doivent rester calmes, sans montrer vos intentions à l’ennemi.
SEME :
– Poussée, ou plus exactement menace. La sensation de retenir l’adversaire, ou mieux, de le maintenir à terre. En contrôlant les mouvements du corps et du sabre avec une sensation de repousser et de peser sur l’adversaire qui peux mieux être maîtrisé, et en permettant au sabreur de contrôler la situation à son avantage, tout en réduisant les ouvertures (Suki ) dans lesquelles il pourrait attaquer.
SHU HA RI :
– Les trois étapes dans le développement complet du sabreur :
•  Shu : Étape d’apprentissage durant laquelle les élèves suivent en détail les instructions des professeurs sans se poser de question.
• Ha : Étape pendant laquelle l’élève expérimenté regarde plus loin les enseignements de son Sensei, pour une compréhension plus juste et plus profonde. A ce stade, il est possible d’enseigner à des élèves qui sont encore dans la section Shu.
• Ri : Étape existant quand la compréhension est suffisante pour pouvoir se trouver seul comme un professeur compétent dans ses propres droits.
Ces trois étapes dont considérablement imbriquées, particulièrement les deux premières.

TACHI KAZE :
– Le vent du sabre :
Le vent du sabre se réfère ici au bruit fait par le sabre lorsqu’il coupe. Quand la coupe est correctement dirigée, le bruit indiquera où se trouve l’adversaire, et ainsi, pour l’adversaire lui-même, le sabre paraîtra silencieux.
TAI CHI TAI BUN :
– Entendre avec votre corps, réfléchir avec votre votre corps ( à l’opposé de vos oreilles et de votre mental ). Ce qui veut dire, se fier aux organes des sens pour percevoir les informations est superficiel, de même que de penser intellectuellement à la technique est sans pertinence. L’étude du sabre devra être sentie et absorbée par tout le corps et, apprise par l’expérience de la pratique et de la vie.
ZANSHIN :
– C’est un autre mot qui ne peut être traduit en Français. Il est souvent traduit comme conscience, vigilance mais ce n’est pas tout à fait juste. La conscience de ce qui est autour, des menaces potentielles, des dangers potentiels,etc, en sont une partie. Il est plus en rapport avec l’état d’esprit après avoir fait une action. Il est caractérisé par le Kamae, ou le Shisei, le Seme, la projection du KI, et la continuité du souffle (où le Kiai serait approprié) après la coupe.
Dans les douze articles sur l’étude du sabre de Muto Ryu, Yamaoka Tesshu l’expliqua comme étant un coup sans aucune pensée. Cette absence de pensée est l’esprit qui retourne à son état d’origine ( Fudoshin ). Il décrit ce retour comme une persistance : C’est comme une goutte d’eau qui reste dans le un bol après qu’il  ait été secoué. Toute l’eau à quitté le bol (engagement total dans l’action) mais il en reste un peu comme s’il en était revenu ( l’esprit retournant à son origine).
Cependant c’est un terme difficile à apprécier. C’est demeurer détaché de la victoire après l’obtention de celle-ci, et en même temps, c’est conserver le même état de préparation après l’achèvement de l’action. Encore que ceci ne soit qu’une partie de la définition de ce mot.
ISHIKI :
L’intention d’effectuer la coupe ou le mouvement dans le travail à mains nues. Etre déterminé dans l’action.

Share This Article