14/02/2010

Spirit

Lorsque l’on parle d’enseignement spirituel dans l’Aïkido, on pourrait penser à un concept religieux ou un peu sectaire. Personnellement, je ne le prends pas comme cela mais plutôt comme une façon d’enseigner qui sort de la « technique », qui permet à celle-ci d’être un petit pas vers une évolution de l’individu.
Vous allez me dire que c’est cela l’Aïkido et pourtant, un grand nombre d’entre nous l’ont oublié et se croient parfois dans une salle de fitness ou sur un ring.

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FUJIMOTO Sensei (Photo Paolo Bottoni)

Si la plupart des professeurs ont le bagage suffisant pour que leurs cours soient d’un niveau technique satisfaisant, un bon enseignant se devrait de transmettre à la fois les techniques et l’esprit de l’Aïkido. Ce devrait d’ailleurs toujours être le cas, puisque le corps et l’esprit sont indissociables, ils sont comme la paume et le dos de la main, l’un ne peut pas exister sans l’autre. Comment dans ce cas enseigner les techniques sans parler d’esprit ?
Le mieux peut-être est de ne pas en parler mais de le faire sentir par l’énergie émise par nos mouvements. Je pense qu’une technique appliquée de façon relâchée, sans trop "déranger" le partenaire, donne une énergie particulière et fait beaucoup plus travailler notre esprit qui s’en trouvera beaucoup plus serein que dans le cas d’un geste ou, par exemple, on tentera de vous broyer le poignet.
Cette forme de travail peut nous faire évoluer de belle manière car nous sortons de la confrontation physique.
Dès qu’il y a « conflit », il n’y a plus « évolution » mais bien « destruction ». Bien sûr, on pourra dire que ce n’est pas efficace, que c’est de l’ "aikido de pédés" (déjà entendu, si c’est vrai) mais c’est quoi l’efficacité finalement? Est-ce d’évoluer ou de détruire l’autre?
J’ai déjà souvent assisté à des cours et des stages au cours desquels le carcan « technique » était intéressant mais il manquait une étincelle que l’on perçoit chez quelques uns.
Dès que cette chaleur apparaît, un grand nombre d’éléments s’en trouve bousculé et des changements interviennent partout sur le tatami, ceci se distingue vraiment dans l’attitude de la majorité des pratiquants devenus plus souriants et plus ouverts.
A l’inverse, certains cours font parfois réfléchir tant les références philosophiques sont nombreuses, je me souviens en particulier d’une leçon (facturée 15€ par personne) dans laquelle le Sensei du jour nous décrivait par de grands gestes les influences des planètes et des marées sur notre Aïki…je n’y suis jamais retourné et je pense d’ailleurs qu’il a disparu de la circulation, peut-être emporté par une météorite ;o)

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OSAWA Sensei (Photo Paolo Bottoni)

L’esprit de O Senseï
Il y a bien longtemps, j’avais entendu parler de l’esprit d’O Senseï et je me demandais bien ce que cela voulait dire. Je comprends un peu mieux en voyant certains grands maitres tels Tamura Sensei et Sugano Senseï, une énergie particulière rôde autour de nous et on dirait parfois que le temps n’a plus le même aspect, c’est peut-être cela l’esprit d’O Senseï finalement. Attention, on ne fait pas de spiritisme, pas de tatamis qui tournent, mais ceux qui ont cotoié les "maîtres historiques" ayant acquis leur art auprès de Maître Ueshiba comprendront ce que je veux dire. Ca se ressent mais ne s’explique pas vraiment…
D’ailleurs, celà s’avère différent selon les maîtres. Pour reprendre les deux mentionnés plus haut, Tamura Sensei sera plus dans la sensation, les mouvements plus "concentrés" tandis que Sugano Sensei nous étouffera par une pratique beaucoup plus "lourde" et ample dans le geste.
Mais tous deux ont une pratique qui sort de l’ordinaire, ce que l’on peut définir par habité par l’"esprit de Morihei Ueshiba". D’autres peuvent nous faire sentir celà mais on les voit, hélas,moins souvent ou ont malheureusement disparu : Saotome Sensei, Tada Sensei, Feu Kanai Sensei, Fujita Sensei, Chiba Sensei parmi ceux que j’ai pu rencontré. Léo Tamaki l’explique également de par ses rencontres avec Shimizu Sensei, le dernier disciple d’O Senseï.

Pour illustrer cette idée, voici un petit entretien avec Mère Thérésa, ce qu’elle ressent est peut-être la même chose que nous ressentons en présence d’un enseignement développant cet esprit.
Le journaliste : « Mère Teresa, vous êtes croyante, donc j’imagine que vous devez prier régulièrement.»
Mère Teresa : « Oui, bien sûr. »
J : « Et quand vous priez, que demandez-vous à Dieu ? »
M.T. : « Quand je prie je ne demande rien. »
J : « Mais alors que faites-vous ? »
M.T. : « J’écoute. »
J : « Et qu’est-ce que Dieu vous dit ? »
M.T. : « Rien. Il est là, tout simplement. »
 

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